
En 2021, la Erasmushogeschool Brussel (EhB) a lancé un parcours ESF pour étudier comment mettre en œuvre la formation en alternance dans les écoles supérieures. mediarte s’est entretenu sur l’apprentissage en alternance dans le secteur numérique avec Jan Van Caneghem, enseignant en Design, Multimédia et Technologie de la communication et avec Tom Hameeuw, co-fondateur de The Pack, qui participe à l’un des projets pilote sur la formation en alternance.
Les incubateurs de la Erasmushogeschool
Quelle est la différence entre un parcours d’apprentissage en alternance et un stage ?
Jan Van Caneghem : "Apprendre en alternance consiste à diviser les objectifs d’apprentissage de la formation sur deux piliers, le premier s’acquiert sur le lieu de travail et le deuxième sur le campus. Lors d’un stage, les étudiants ont déjà acquis les connaissances préalables. Ils peuvent par exemple programmer en PHP, Dot Net, React ou Angular ou faire du développement front-end et mettre leurs connaissances en pratique sur leur lieu de travail. Bien sûr, ils approfondiront encore leurs compétences pendant un stage et les mettront en pratique. En revanche, dans le cas d’un parcours d’apprentissage en alternance, il se peut que l’étudiant n’ait jamais travaillé avec React et qu’il l'apprenne au sein de l’entreprise. L’objectif pédagogique poursuivi au sein de l’entreprise est la maîtrise de React de la part de l’étudiant. Cela signifie que l’entreprise reprend une partie de sa fonction d’enseignement. Bien entendu, cela se fait en concertation avec l’établissement scolaire."
Les nouvelles technologies se développent à une telle rapidité qu'elles sont souvent mieux apprises dans des entreprises qui les utilisent immédiatement que par des enseignants qui suivent les nouvelles tendances.
L’apprentissage en alternance s’étale-t-il sur une année académique complète ?
Jan : "Cela dépend. Il est possible que l’étudiant ait déjà un travail pendant son parcours d’apprentissage en alternance et qu’il acquiert des compétences sur son lieu de travail et sur le campus. Il se peut également qu’il acquiert certaines compétences sur le campus et des compétences supplémentaires sur le lieu de travail."
"Ce que nous testons actuellement, ce sont des micro-stages. Ils consistent à acquérir des compétences très spécifiques sur le lieu de travail. Ils se déroulent sur une période très courte, généralement quatre ou cinq jours par parcours. Cette formule permet de suivre trois parcours sur une formation de douze semaines. L’avantage des micro-stage est qu’ils sont faciles à organiser et n’impactent pas trop le programme de formation."
Pourquoi l’apprentissage en alternance est-il si important ?
Jan : "La formation « Multimedia et Technologie créative » est soumise à un monde technologique en pleine évolution, dans lequel les nouvelles technologies se développent à une telle rapidité qu'elles sont souvent mieux apprises dans des entreprises qui les utilisent immédiatement que par des enseignants qui suivent les nouvelles tendances."
"En outre, l’apprentissage en alternance répond aux objectifs poursuivis par la formation continue. Il permet d’organiser une formation en modules qui peuvent être suivis séparément par les étudiants. Enfin, l’apprentissage en alternance s’adresse à un public plus large. En effet, grâce à l’apprentissage en alternance, les personnes qui éprouvaient jusqu’à présent des difficultés à accéder aux études de troisièmes cycles, peuvent désormais suivre des études supérieures."
Les étudiants qui arrivent sur le marché du travail doivent être armés. D’une part, ils doivent disposer des compétences nécessaires ; d’autre part, ils doivent avoir une meilleure image de soi et une plus grande confiance en soi.
L’apprentissage en alternance est déjà intégré dans l’enseignement technique et professionnel. Pour l’enseignement supérieur, la méthode est innovante. Les approches sont-elles différentes ?
Jan : "Au sein de l’enseignement technique et professionnel, l’apprentissage en alternance a une fonction plus exécutive. Ce que nous faisons, c’est donner aux entreprises une fonction d’enseignement, en concertation avec la Haute École. Nous examinons ensemble les technologies qui seront enseignées en entreprise et celles qui seront enseignées à la Haute École. Par exemple, la personne qui enseigne le Front-end chez nous est plus à l'aise dans Angular et moins dans React. Nous organisons alors un stage au sein d’une entreprise spécialisée dans React."
"Mais nos parcours ne concernent pas uniquement les compétences technologiques. Nous considérons également les compétences non techniques que nous pouvons transmettre sur le lieu de travail. Lorsqu'il s'agit de communiquer, de défendre ou de justifier les processus d'avancement d'un projet ou les réunions en entreprise, ces compétences s'apprennent aussi mieux sur le lieu de travail."
Comment procédez-vous ?
Jan : "Nous avons étudié un certain nombre d’entreprises et élaboré un parcours d’apprentissage en alternance. Ainsi, nous avons développé des modules pour trois unités de formation : Front-end Development, VR et Design, et enfin, User Interface Design. Pour ce faire, nous allons mettre en place les premiers incubateurs, de courts stages en entreprise, au cours du deuxième semestre, que nous évaluerons ensuite."
"Dans ces incubateurs, les étudiants acquerront une partie des compétences sur le lieu de travail. Nous voulons le faire dans un environnement sûr et veiller à ce que les objectifs d’apprentissage soient atteints."
Qu’est-ce qui incite une entreprise à participer à ce programme de formation ?
Jan : "Les entreprises reconnaissent que les étudiants ont acquis les bases, mais elles sont insuffisantes. Dans ce sens, la formation est bénéfique tant à l’étudiant qu’à l’entreprise. La formation en alternance est certainement bénéfique, vu qu’aujourd’hui les entreprises doivent organiser des académies intramuros, parce qu’elles considèrent que les connaissances acquises sont insuffisantes. Ensemble, nous nous assurons que nos diplômés aient les connaissances et les compétences nécessaires pour se mettre immédiatement au travail."
"Les étudiants qui arrivent sur le marché du travail doivent être armés. D’une part, ils doivent disposer des compétences nécessaires ; d’autre part, ils doivent avoir une meilleure image de soi et une plus grande confiance en soi."

Apprendre en alternance chez The Pack
Qu’implique la collaboration entre « The Pack » et la Erasmushogeschool Brussel ?
Tom Hameeuw : "Nous connaissons la Haute École depuis longtemps, et à un moment donné, nous avons vu qu’ils enseignaient Unity, en plus de motion graphics et 3D. C’est une formation intéressante, car elle est assez large. Nous avons alors commencé à interagir avec la EhB et nous avons analysé les possibles interactions entre la EhB et l’entreprise. De cette façon, les étudiants sont plus rapidement impliqués dans des projets réels. Cela ne doit pas nécessairement se faire dans un contexte commercial, mais dans le cadre de projets de recherche, par exemple. Parce que nous aussi, nous avons le sentiment que notre secteur évolue à nouveau énormément. Comme l'essor de la production virtuelle. Au lieu de la classique touche verte, vous placez un acteur ou un conférencier devant de grands écrans LED sur lesquels les arrière-plans sont immédiatement diffusés. Il peut s’agir d’images en direct filmées à l’avance ou d’images en 3D. Une première idée était de travailler ensemble autour de ce sujet et d’organiser un test qui peut être utilisé par la Haute École et par les entreprises."
Pour nous, en tant qu’entreprise, il est intéressant de voir quelles sont les nouvelles technologies et comment les jeunes les abordent.
Qu’est-ce qui vous manque le plus chez les diplômés ?
Tom : "Connaître le fonctionnement des choses dans un projet réel. Les étudiants ont déjà fait beaucoup de choses, seuls ou en petits groupes. Mais ils ne savent pas travailler efficacement dans un processus de production. Ou organiser leur travail afin qu’un collègue puisse immédiatement reprendre le travail si nécessaire. Certains étudiants le font déjà. D’autres doivent l’apprendre et la formation en alternance peut combler cette lacune."

L’apprentissage en alternance exige de la part de l’entreprise un investissement important. Que retire-t-elle en retour ?
Tom : "Environ 40 à 50 % de nos employés ont été recrutés après un stage ou un parcours CFI. Lors d’un tel parcours, l’entreprise prend également en charge une partie de la formation, transmet les compétences nécessaires à la mise à l’emploi. et évalue les unités soumises à l’apprentissage en alternance."
"Nous avons donc déjà de l’expérience dans ce domaine. Aujourd’hui, nous voulons intégrer l'apprentissage en alternance dans les activités quotidiennes de notre entreprise. Nous disposons souvent d’un délai de plusieurs mois pour les projets de plus grande envergure. Et il n’est pas toujours facile d’y intégrer des étudiants qui ne doivent acquérir que certaines compétences. En collaboration avec Erasmus, nous examinons donc pour quelles parties d'une mission nous pouvons engager les étudiants avec l'encadrement nécessaire et pour quelles parties la portée de leur mission est encore suffisamment étendue."
"Je suis heureux que cette étape soit franchie avec l’apprentissage en alternance, car nous pensions que c'était un peu l'un ou l'autre en Belgique. La formation en amont, le stage en aval. Je pense que la formation en alternance permet de comprendre ce que sera réellement un emploi plus tard. Et pour nous, en tant qu’entreprise, il est bien sûr intéressant de voir quelles sont les nouvelles technologies et comment les jeunes les abordent. Elle nous permet également de connaître nos futurs collaborateurs."
Quels sont les risques de l’apprentissage en alternance ?
Tom : "On ne sait bien sûr jamais à l’avance les résultats qu'elle donnera. C’est aussi une aventure pour nous. Il peut y avoir des personnes qui ont de bonnes intentions et qui constatent que ce travail n’est pas fait pour elles ou qui ne s’intègrent pas dans une équipe. Cela se produit également pendant les stages classiques et c’est le principal revers de la médaille pour une entreprise. Vous investissez, sans connaître le résultat."

Qu’est-ce qui est important pour réussir chez vous ?
Tom : "Je pense qu’un étudiant doit oser faire le pas et prendre les commandes en main. Bien entendu, nous ne pouvons jamais attendre d’un étudiant ou d’un ancien élève qu’il possède déjà toutes les compétences. Sinon, vous n’auriez pas besoin d’un parcours d’apprentissage. Mais l’initiative doit également venir de l’étudiant lui-même. C’est crucial pour la réussite d’un processus. Quand je pense aux quelques parcours qui n'ont pas été couronnés de succès, c'est souvent à cause de cela. Ce qui peut également être perçu comme une absence de correspondance au niveau personnel. Mais jusqu’à présent, c’était une minorité absolue chez nous. La plupart des parcours CFI que nous avons réalisés étaient très positifs."